Les dessous de la pilule

Comment fonctionne le cycle menstruel féminin ?

Pour comprendre l’action de la pilule, rappelons comment fonctionne le cycle menstruel.


Le cycle menstruel féminin se déroule en deux phases, avant et après l’ovulation.

Avant l’ovulation

Avant l’ovulation, c’est la phase folliculaire : le cerveau produit l’hormone FSH qui stimule la production d’oestrogènes par les ovaires. L’oestrogène fait maturer les follicules et croître l’endomètre. Vers le milieu du cycle, l’oestrogène s’accumulant, elle stimule la production de glaires cervicales « sperm friendly » nécessaires à la fertilité, et le cerveau finit par produire l’hormone LH qui déclenche l’ovulation : un ovule sort de l’un des deux ovaires.

Après l’ovulation

Après l’ovulation, c’est la phase lutéale : l’ovule produit l’hormone progestérone. Si l’ovule est fécondé, la progestérone favorise l’implantation de l’embryon dans l’endomètre de l’utérus pour démarrer la grossesse, et inhibe la production de glaires cervicales « sperm-friendly ». La progestérone restera élevée jusqu’à l’accouchement. S’il n’y a pas fécondation l’ovule disparaîtra, la progestérone chutera, ce qui déclenche les règles.


Le cerveau joue un rôle primordial dans le cycle menstruel : c’est lui qui décide quand produire de l’oestrogène et quand déclencher l’ovulation en mesurant en permanence les niveaux d’hormones présentes dans le sang. 

Comment fonctionnent les différentes pilules ?

Les pilules combinées

Les pilules combinées (autrement appelées oestroprogestatives) délivrent une haute dose d’oestrogène et de progestérone synthétiques dans le sang.


Le cerveau est alors trompé en croyant qu’il s’agit d’oestrogène et/ou de progestérone naturels. Pensant qu’il y a suffisamment d’oestrogène et de progestérone dans le sang, le cerveau ne va alors pas ordonner aux ovaires d’en produire.
 

Ainsi les ovaires ne reçoivent plus l’ordre de produire de l’oestrogène et d’ovuler, et la progestérone n’est plus sécrétée. Sous pilule, on peut donc dire que la communication cerveau-ovaires est coupée. Les ovaires se mettent en « congé » et les hormones sexuelles sont à plat. Résultat : l’ovulation n’a pas lieu, nous ne sommes plus fertiles et ne pouvons pas tomber enceinte.

Les pilules progestatives

Les pilules progestatives ne contiennent qu’un progestatif synthétique. Elles n’inhibent pas forcément l’ovulation mais agissent quoi qu’il en soit en affinant l’endomètre et en inhibant les glaires cervicales « sperm friendly » nécessaires à la fertilité.

Quelles sont les autres formes de contraceptions hormonales ?

L’implant

L’implant contraceptif est un petit bâtonnet inséré dans le bras qui diffuse directement dans le sang les hormones de la pilule, il a donc les mêmes effets.

Le stérilet

Le stérilet hormonal Mirena est quant à lui inséré dans l’utérus. Il n’inhibe pas systématiquement l’ovulation mais affine lui aussi l’endomètre et réduit les glaires cervicales.


Il serait donc erroné de dire que la pilule et autres contraceptions hormonales régulent nos hormones. Au contraire, elles inhibent la production d’hormones naturelles.

A qui prescrit-on la pilule ?

En 2013, 41% des femmes entre 15 à 49 ans avaient recours à la pilule[1]. Et même si son usage a régressé suite à la crise de la pilule cette année-là, elle reste le moyen de contraception le plus utilisé en France en 2016[2]. Cependant la régression de la pilule ne concerne pas les 15-19 ans.


La pilule est prescrite dans un objectif de contraception dans environ la moitié des cas. Dans l’autre moitié, elle est prescrite pour des problèmes hormonaux : règles douloureuses, absentes ou irrégulières, acné ou autres problèmes de peau, endométriose, ou bien autres symptômes de type syndrome prémenstruel, dépression, irritabilité, fluctuations d’humeur...
 

Or la pilule ne régulant pas les hormones, elle ne fait que masquer les symptômes sans régler le problème à la source. Elle ne peut donc pas être considérée comme un traitement pour ces dérèglements hormonaux.

Quelle est l’action de la pilule au-delà du système reproducteur ?

La pilule, en inhibant la production naturelle d’oestrogène et de progestérone, et en ajoutant une dose importante d’hormones synthétiques dans notre organisme, perturbe le fragile écosystème hormonal de notre corps. Par ricochet, les autres hormones voient leur production impactée. 

 

Les hormones thyroïdiennes


Produites par la thyroïde, les hormones thyroïdiennes affectent chacune des cellules de notre corps et régulent le métabolisme au sens large (pousse des cheveux et des ongles, énergie, humeur, poids…). Or la pilule peut affaiblir l’activité thyroïdienne et contribuer aux symptômes suivants : chute de cheveux, prise de poids, irritabilité, fatigue…


Les hormones androgènes
 

Il s’agit des hormones mâles (testostérone et ses dérivés) qui régulent chez la femme l’ovulation, la libido et le désir[3], la masse musculaire ou encore la santé des os. Produites en partie par les ovaires, les hormones androgènes sont inhibées sous pilule. D’où les effets secondaires suivants : libido à plat, difficulté à atteindre l’orgasme, baisse de l’attirance pour votre partenaire…


Les hormones de régulation de la glycémie
 

La glycémie est le taux de sucre dans le sang. A chaque fois que l’on mange, la glycémie augmente car les sucres (glucides) de notre alimentation passent dans le sang. L’hormone insuline est alors sécrétée pour faire redescendre la glycémie à un niveau normal en faisant passer le sucre du sang vers les cellules. Or la pilule peut dérégler ce mécanisme et intervenir dans les symptômes suivants : fatigue, irritabilité, SOPK (syndrome des ovaires polykystiques), fringales de sucre, augmentation du risque de développer un diabète de type 2…


Son action va au-delà des hormones et perturbe notre santé globale

Des effets sur le foie

Le foie est chargé de réguler nos hormones en mettant de côté celles qui sont utilisées ou présentes en excès. La dose importante d’hormones synthétiques délivrées au quotidien par la pilule lui donne ainsi une dose de travail supplémentaire considérable.

Des effets sur le statut nutritionnel

La pilule épuise certains stocks de nutriments, notamment les vitamines du groupe B, le magnésium ou encore le zinc par exemple[4], des nutriments d’ailleurs essentiels à la régulation hormonale, mais aussi à l’immunité, la fertilité, la production d’énergie cellulaire, la santé des cheveux, du système nerveux… [5]


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Perturbation du microbiote intestinal

La pilule contribue à amoindrir la population de bonnes bactéries au sein du microbiote intestinal. Or il régule de nombreux paramètres de notre organisme comme l’immunité, les hormones, la digestion, l’humeur, le poids… Si le microbiote intestinal est déséquilibré, ces fonctions peuvent être impactées négativement[6].
La pilule, comme tout médicament, n’est donc pas anodine et a des conséquences sur l’entièreté de notre organisme. 

Que se passe-t-il à l’arrêt de la pilule ?

A l’arrêt de la pilule, la communication entre cerveau et ovaires est censée se remettre en place : ainsi les ovaires reprennent du service, produisent de l’oestrogène, ovulent, et les ovules produisent de la progestérone.


Néanmoins, cette communication peut prendre du temps à se reconstruire et certaines femmes mettent plusieurs mois à retrouver leurs règles naturelles[7] [8] [9]. Par ailleurs, l’écosystème hormonal ne se remet pas nécessairement des effets de la pilule sans aide, et il en va de même pour les autres fonctions affectées par la pilule (foie, microbiote intestinal, stock de nutriments…).
 

Enfin, l’arrêt de la pilule peut, chez certaines personnes, causer un « effet rebond ». Autrement dit, la production naturelle d’hormones coupée pendant la durée de prise de pilule peut se remettre à fonctionner avec un peu trop de zèle. C’est souvent le cas des hormones androgènes qui peuvent faire un bond post pilule, causant chute de cheveux ou acné par exemple[10].  

Réflexion sur la pilule

Historiquement, la pilule a permis aux femmes de s’émanciper, et aujourd’hui elle convient à de nombreuses personnes. Ceci dit, très peu de femmes prennent la pilule en connaissance de causes, avec un réel « consentement éclairé », c’est-à-dire en étant informées des bénéfices, des risques ou encore de l’étendue des effets secondaires, etc.


Par ailleurs, on prend souvent la pilule très tôt, quelques années à peine voire quelques mois après les premières règles. C’est notamment le cas des jeunes filles qui rencontrent des symptômes comme l’acné, les règles douloureuses ou irrégulières, qui ont un SOPK ou de l’endométriose. Ces jeunes filles étant devenues femmes arrêtent souvent la pilule au moment d’un désir d’enfant. Or les dérèglements présents avant la prise de pilule resurgissent la plupart du temps, rendant potentiellement la conception difficile, d’autant plus si elles arrêtent la pilule « sur le tard », à un âge où la fertilité décline naturellement.
 

La prise de pilule est donc un choix qui mérite réflexion.

En conclusion

Si la pilule a toute sa place dans le panel de contraceptions médicales, les femmes à qui on la prescrit devraient être davantage informées sur les risques et sur le fait qu’elle ne présente pas une solution aux dérèglements hormonaux. Par ailleurs, sachez qu’il existe d’autres moyens de contraception qui méritent également d’être évalués, y compris des méthodes de contraception au masculin comme par exemple la contraception thermique qui fonctionne par remontée testiculaire, qui est 100% naturelle et réversible. Et quand on y pense, les femmes ne sont fertiles que quelques jours par mois alors que les hommes le sont 24h/24 ; pourquoi la contraception ne leur incomberait pas aussi à eux ?

 

Article rédigé par Marion Baudier-Melon
Marion Baudier-Melon (Marion Nutrition) est Nutrithérapeute spécialisée dans les problèmes hormonaux féminins. Formée à Londres et ayant elle-même souffert de dysfonctionnements hormonaux, elle propose des consultations et du contenu éducatif (conférences, ebooks…) pour aider les femmes à surmonter leurs problèmes hormonaux avec l’alimentation et les compléments alimentaires. Ses domaines de prédilection : endométriose, SOPK (syndrome des ovaires polykystiques), SPM (syndrome pré-menstruel), règles difficiles, aménorrhée, fertilité/conception/grossesse, problèmes de pilule ou à l’arrêt de la pilule, hypothyroïdie, acné, chute de cheveux…

NOS SOURCES

[1] Haut Conseil de l’Egalité, Repères Statistiques

[2] Santé Publique France, Baromètre Santé 2016 Contraception

[3] Davis, Susan. « Testosterone and sexual desire in women. » Journal of Sex Education and Therapy 25, no. 1 (2000): 25-32

[4] Shere, Mahvash, Priya Bapat, Cheri Nickel, et al. « Association between use of oral contraceptives and folate status: a systematic review and meta-analysis. » Journal of Obstetrics and Gynecology Canada 37, no. 5 (2015): 430-438

[5] Palmer, M., A. Saraceno, A. Vaiarelli, and G. Carlomagno. « Oral contraceptives and changes in nutritional requirements. » European Review for Medical and Pharmacological Sciences 17, no. 13 (2013): 1808-1810

[6] Khalili, H. et al. « Oral Contraceptives, Reproductive Factors and Risk of Inflammatory Bowel Disease » Gut 62, no. 8 (2013):1153-59        10.1136/gutjnl-2012-302362    

[7] Goth, Christian, P. Frank-Hermann, A. Schmoll, E. Oderhart, and G. Freundl. « Cycle characteristics after discontinuation of oral contraceptives. » Gynecological Endocrinology 16, no. 4 (2002): 311-313

[8] Jacobs, H.S., U.A. Knuth, M.G. Hull, and S. Franks. « ‘Post-pill’ amenorrhoea - cause or coincidence? » The BMJ 2, no. 6092 (1977): 940-942        10.1136/bmj.2.6092.940    

[9] Steele, S.J., Bridgett Mason, and Ann Brett. « Amenorrhoea after discontinuing combined estrogen-progestogen oral contraceptives. » The BMJ 4, no. 5888 (1973): 343        10.1136/bmj.4.5888.343    

[10] Panzer Claudia, Sarah Wise, Gemma Fantini et al. « Impact of oral contraceptives on sex hormone-binding globulin and androgen levels: a retrospective study in women with sexual dysfunction. » The Journal of Sexual Medicine 3, no. A (2006): 104-113        10.1111/j.1743-6109.2005.00198.x
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FAQ

Est-ce que la pilule empêche l'ovulation ?

Les pilules combinées permettent de bloquer l’ovulation. Les pilules progestatives n’inhibent pas forcément l’ovulation mais permettent de ne pas être fertiles. 

Quand faire l'amour quand on prend la pilule ?

Si tu prends ta pilule tous les jours à heure fixe sans l’oublier, tu peux faire l’amour sans utiliser d’autres contraceptifs comme un préservatif. 

Est-il possible de tomber enceinte en prenant la pilule ?

La pilule est un contraceptif très efficace. Si vous prenez correctement la pilule, vous ne pouvez pas tomber enceinte. Il existe des cas où des femmes sont tombées enceinte malgré tout, mais c’est très rare. 
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