Grossesse et infection à streptocoques B

On parle souvent de la listéria, de la toxoplasmose, mais peu de l'infection à streptocoques B. Qu'est ce que c'est ? Peut-on la prévenir ? Quels sont les risques lors de la grossesse ? On a fait le point !

 

Les infections à streptocoques A (Streptococcus pyogenes) et B (Streptococcus agalactiae) sont fréquentes. Ces deux bactéries font partie de la flore commensale, c’est-à-dire qu’elles sont des micro-organismes bénéfiques qui vivent dans et sur le corps humain, sans causer de maladies mais qui peuvent causer des symptômes dans certaines conditions ou chez les personnes à risques. Le streptocoque B provoque des infections invasives graves (bactériémie, méningite) chez les nouveau-nés.

Qu’est ce que l’infection à streptocoques B ?

Les streptocoques du groupe B (SGB), ou Streptococcus agalactiae, sont des bactéries que l’on retrouve couramment dans le vagin, le rectum ou la vessie.

 

Normalement présent dans le tube digestif, le streptocoque B n’est pas pathogène. Toutefois, cette bactérie peut parfois coloniser les parties génitales des futures mères, c’est là qu’il devient dangereux. Le streptocoque B peut alors se transmettre au fœtus lors de la gestation, mais aussi pendant l’accouchement[1]. Le dépistage est réalisé par un prélèvement vaginal entre 34 et 37 SA.

 

Quels sont les symptômes durant la grossesse ?

 

Souvent, les femmes atteintes de streptocoque du groupe B ne présentent aucun symptôme (près de la moitié des cas)[2]. Parfois on peut avoir des signes cliniques comme des sensations de brûlures au niveau du vagin.

En dehors de la grossesse, le streptocoque B peut aussi parfois être responsable d’infections bénignes qui seront facilement traitées avec des antibiotiques classiques.

Cette bactérie ne cause souvent pas de problème chez la mère; par contre, si elle en vient à infecter le nouveau-né, il est possible que des complications rares mais graves se développent.

 

Qui est porteur ?

 

Chez la femme enceinte,  les taux de portage varient mais on estime que : environ 10 à 30% en sont porteuses[3], en France cela représente 10% soit au moins 75 000 par an[4].

 

Parmi celles-ci, environ 40 à 70% d’entre elles transmettent la bactérie à leur enfant pendant l’accouchement et 1 nouveau-né sur 2 000 développera une infection[5].

 

On ne sait pas encore pourquoi certaines se retrouvent porteuses et d’autres non. Cela peut être dû à une prédisposition génétique et/ou un microbiote qui aurait un déséquilibre comme nous le verrons en dessous.

 

Le dépistage positif du Streptocoque B n’est pas une contre-indication à l’allaitement.

Quels sont les risques pendant la grossesse ?

Pour le nouveau-né : 

 

« Le streptocoque B est la première cause d’infection néonatale » rappelle la Pr Claire Poyart, chef de service de Bactériologie à l’Hôpital Cochin de l’APHP et responsable du Centre national de référence des Streptocoques. Elle peut provoquer des fausses couches, ainsi que des naissances prématurées [6].

 

D’après une étude, 57 000 fausses couches dans le monde par an sont imputables à la bactérie [7]. Elle serait également à l’origine de 3,5 millions de naissances prématurées [7].  

 

En cas de contamination, le nouveau-né peut développer une infection sévère. Cette infection se traduit le plus souvent par une septicémie (infection générale de l’organisme) et une détresse respiratoire (incapacité des poumons à fonctionner correctement). Quelquefois, ces symptômes sont associés à une inflammation des membranes qui enveloppent le cerveau (méningite). Elle peut être responsable du décès ou d’un handicap chez les nourrissons.

 

Soit l’enfant est infecté dès la naissance, soit il s’infecte plus tardivement, en général 3 semaines après l’accouchement. Environ 300.000 enfants en sont victimes chaque année dans le monde [8]. En France, chaque année, 500 cas d'infections néonatales invasives associées au streptocoque du groupe B sont dénombrés. Elles provoquent entre 50 et 100 décès [9].

 

Pour la maman : 

 

Pour la maman après l’accouchement, l’infection peut provoquer une infection urinaire, une endométrite (infection de la paroi interne de l’utérus), une septicémie ou une chorio-amniotite (infection des tissus placentaires et du liquide amniotique).

Quels sont les facteurs de risque de transmission ?

Lorsque la mère est infectée, certains facteurs augmentent la probabilité que l’infection se transmette à l’enfant, notamment :
- Déclenchement artificiel ou rupture des membranes avant 37 S de grossesse
- Rupture des membranes lorsque le travail commence à la date prévue et qu’il est probable qu’il dure plus de 18 heures
- Fièvre légère inexplicable durant le travail
- Antécédents de naissance où le streptocoque B a été transmis au bébé
- Présence de SGB dans l’urine ou infection de la vessie causée par le SGB.


Les premiers signes d’infection au streptocoque B par le nouveau-né sont : 
- fièvre
- irritabilité
- léthargie
- difficultés respiratoires
- teinte bleutée de la peau
 - difficulté à s'alimenter.

En quoi consiste le test de dépistage durant la grossesse?

La Haute Autorité de Santé recommande à la future maman de réaliser un dépistage systématique du portage du Streptocoque B pendant la grossesse, entre la 34e et la 37e semaine de grossesse. Ce prélèvement vaginal est le plus souvent effectué durant la dernière visite gynécologique de contrôle. Il doit aussi être réalisé en cas de travail prématuré ou de rupture prématurée des membranes.


Le test est simple et sans douleur; il consiste à prendre un prélèvement dans le vagin et le rectum à l’aide d’un coton-tige. Le prélèvement fera ensuite l’objet d’une culture pour vérifier la présence de SGB.
 

Même en cas de césarienne planifiée, vous devez passer un test de dépistage dans l’éventualité où vous perdriez vos eaux ou que le travail commencerait avant la date prévue.

Que dois-je faire si je suis atteinte pendant ma grossesse ?

Si vous êtes atteinte ou manifestez n’importe lequel des symptômes mentionnés ci-dessus, vous recevrez des antibiotiques par voie intraveineuse durant le travail ou si vous perdez vos eaux avant terme. Cette stratégie permet de réduire considérablement les infections à la naissance. Les antibiotiques oraux et les antibiotiques pris avant l'accouchement se sont révélés inefficaces pour prévenir la transmission du streptocoque du groupe B. Il doit être pris pendant, sinon il y a un risque de réapparition de la bactérie.


La HAS recommande un traitement antibiotique dans les cas suivants : 
- En cas de diagnostic de portage de SGB pendant la grossesse, à distance ou non de la naissance ;
- En cas de bactériurie à SGB pendant de la grossesse ;
- En cas d’antécédent d’infection néonatale à SGB ;
- En l’absence de prélèvement vaginal de dépistage du SGB, si 1 des facteurs de risque suivants est présent : l’accouchement survient avant 37 SA, la durée de rupture des membranes est supérieure à 12 heures ou la température maternelle dépasse 38° C au cours du travail. 
- Si vous avez un antécédent d’infection materno-fœtale à SGB ou présenté au cours de la grossesse une bactériurie à SGB, le traitement antibiotique sera obligatoire. 
 

Si la bactérie est détectée dès la naissance chez le nouveau-né, un antibiotique est administré au nourrisson également par intraveineuse, durant ses premières 48 heures de vie.
Mais l'infection pourrait se déclarer dans les 7 jours suivant la naissance, voire après. Et là les traitements sont moins au point.
Des vaccins contre le streptocoque B sont à l’étude, mais pas encore de vraies perspectives…

Comment prévenir le risque au troisième trimestre ?

Il existe des facteurs de risque sur lesquels nous ne pouvons pas agir, par exemple, l’âge et des pathologies sous-jacentes, de type diabète ou cancer, constituent des facteurs de risque possibles.


On peut essayer de réduire le risque d’infection en soignant son microbiote. Ces techniques sont peu chères et faciles à mettre en place.

Manger des aliments fermentés

Si la flore intestinale est déséquilibrée, certaines bactéries comme le SGB vont en profiter et proliférer à la place de nos bonnes bactéries.


Exemples d’aliments fermentés :
La choucroute
Les yaourt bio et kéfir (si vous tolérez les laitages, essayez aussi les yaourts au lait de brebis, plus digestes). Dans une étude, la consommation de yaourt était inversement corrélée à la colonisation de SGB[10].
 

Si vous voulez maximiser les effets, vous pouvez aussi prendre des probiotiques. Des études ont notamment montré l’impact positif des probiotiques, notamment les souches Lactobacillus plantarum C11 (la plus forte propriétés anti SGB)[11]. D’autres études sur les singes mentionnent des souches comme Lactobacillus jensenii, efficaces car “habitués” de la colonisation vaginale[12]. Mais la plupart des études mentionnent l’importance d’avoir plusieurs souches pour moduler leurs effets[13]. 

Porter uniquement des sous vêtements bio en coton

Les fabriques synthétiques comme le nylon, le lycra gardent l’humidité près de la peau, et encouragent le développement de bactéries.
- On privilégie les fabriques naturelles comme le coton
- On évite les strings
- On dort sans culotte la nuit !

Consommer du vinaigre de cidre de temps en temps

Le vinaigre de cidre contient de l’acide acétique, qui limite la prolifération des bactéries. On peut essayer ½ cuillère à café avant les repas, ou sinon dans vos salades.
Bonus : ça aide à digérer, ce qui est toujours appréciable au troisième trimestre !

Réduire le sucre et les farines blanches

Le sucre et les glucides non complets et raffinés (comme le pain blanc, la farine blanche…) encouragent la croissance de ces pathogènes. On échange nos farines blanches pour des farines complètes, idem pour les pâtes et le riz.
On évite les sucres raffinés. Et en plus c’est bien plus healthy ! 

Opter pour de l’huile de coco

L’huile de coco a des propriétés anti bactérienne. Utilisez-la de temps en temps !

Quel est l’impact sur le microbiote ?

Au-delà des risques pour vous et pour votre enfant, si vous êtes testée positive, vous allez recevoir un traitement antibiotique durant votre travail. 

 

Le microbiote se constitue lors de la naissance par un phénomène appelé colonisation bactérienne. Lors d’un accouchement par voie basse, le bébé passe par la muqueuse vaginale, colonisée par des milliards de bactéries. Ainsi, cette exposition agit comme un “premier vaccin”, lui permettant de développer son immunité.

 

Les études ont montré que le mode d’accouchement avait un impact décisif dans le microbiote du bébé. Les enfants nées par voie basse à la maison, et exclusivement allaités, ont un plus grand nombre de bactéries “bénéfiques” [14]. Les différences les plus notables se voient pour les bacteroides, qui auraient une influence positive sur le système immunitaire et seraient considérées comme pouvant aider à résorber les inflammations [15].

 

Pour en savoir plus, allez voir notre article sur le microbiome du nourrisson.

 

Quand on prend un traitement antibiotique, toutes les bactéries sont tuées, y compris les bonnes. Une étude[16] sur des mamans ayant reçu des antibiotiques suite à une infection à SGB a montré que les bébés avaient un microbiote différent (moins de bacteroides bénéfiques, beaucoup trop de enterococcus and clostridium), et que ces différences persistaient encore plus si le bébé était né par césarienne. Mais la bonne nouvelle c’est que l’allaitement semblait corriger une partie de ces effets (moins de clostridium, plus de lactobacillus) !

Peut-on le traiter “naturellement” ?

J’ai été testée positive, est-ce que je peux faire quelque chose ?
Vous pouvez essayer de suivre ces conseils pendant au moins 2 semaines, et demander de vous faire re tester, si c’est possible. L’idée est de développer les bonnes bactéries, et de booster son système immunitaire. Au mieux vous aurez réduit les risques de contamination du bébé en cas d’examen vaginaux, de décollement des membranes, et en général durant le travail !

Vitamine C

1000 mg par jour en plusieurs fois.. On préférera les sources naturelles comme le camu camu ou l’acérola.

Certains probiotiques

Comme des souches de Lactobacillus (L. rhamnosus et L. reuteri) qui en cas de contamination auraient selon une étude des effets potentiellement thérapeutiques sur le SGB (étude sur des femmes enceintes positives au GBS durant la 35-37ème semaine, avec une réduction de la colonisation au moment de l’accouchement voir un traitement)[17]; une autre étude mentionne des bifidobactéries, qui auraient un effet antibactérien.[18]

Limiter le sucre

On limite le sucre, raffiné ou non, même le sucre naturel (le fuel des mauvais micro-organismes). Et on suit les autres conseils de prévention du dessus ! Attention toutefois ne jamais appliquer directement de l’huile de coco ou faire des bains intimes avec du vinaigre de cidre, comme certains sites le laissent entendre ! Et on échange avec son gynécologue ou sa sage femme avant de prendre des probiotiques.

NOS SOURCES

[1] https://sante.lefigaro.fr/article/grossesse-toujours-pas-de-vaccin-contre-le-streptocoque-b/

[2] Haute Autorité de santé, 2001

[3] Anna C. Seale et al., « Estimates of the Burden of Group B Streptococcal Disease Worldwide for Pregnant Women, Stillbirths, and Children », Clinical Infectious Diseases: An Official Publication of the Infectious Diseases Society of America 65, nᵒ suppl_2 (6 novembre 2017): S200‑219, https://doi.org/10.1093/cid/cix664.

[4] Haute Autorité de santé, 2001

[5] https://www.pregnancyinfo.ca/fr/your-pregnancy/routine-tests/group-b-streptococcus-screening/

[6] https://sante.lefigaro.fr/article/grossesse-toujours-pas-de-vaccin-contre-le-streptocoque-b/

[7] Estimates of the Burden of Group B Streptococcal Disease Worldwide for Pregnant Women, Stillbirths, and Children  Anna C Seale, Clinical Infectious Diseases, Volume 65, Issue suppl_2, 15 November 2017, Pages S200–S219, November 2017

[8] https://academic.oup.com/view-large/figure/113042591/cix66402.jpeg

[9]https://sante.lefigaro.fr/article/grossesse-toujours-pas-de-vaccin-contre-le-streptocoque-b/

[10]  Lisa Hanson et al., « Feasibility of Oral Prenatal Probiotics against Maternal Group B Streptococcus Vaginal and Rectal Colonization », Journal of Obstetric, Gynecologic, and Neonatal Nursing: JOGNN 43, nᵒ 3 (juin 2014): 294‑304, https://doi.org/10.1111/1552-6909.12308.

[11] Malgorzata Bodaszewska-Lubas et al., « Antibacterial Activity of Selected Standard Strains of Lactic Acid Bacteria Producing Bacteriocins--Pilot Study », Postepy Higieny I Medycyny Doswiadczalnej (Online) 66 (25 octobre 2012): 787‑94, https://doi.org/10.5604/17322693.1015531.

[12] L. A. Lagenaur et al., « Prevention of Vaginal SHIV Transmission in Macaques by a Live Recombinant Lactobacillus », Mucosal Immunology 4, nᵒ 6 (novembre 2011): 648‑57, https://doi.org/10.1038/mi.2011.30.

Rose 2nd WA2nd, McGowin CL, Spagnuolo RA, Eaves-Pyles TD, Popov VL, PylesRB. Commensal bacteria modulate innate immune responses of vaginal epithelial cell multilayer culture. PLoS One 2012;7:e32728.

[13] Wang Ya, Cheryl Reifer, et Larry E. Miller, « Efficacy of Vaginal Probiotic Capsules for Recurrent Bacterial Vaginosis: A Double-Blind, Randomized, Placebo-Controlled Study », American Journal of Obstetrics and Gynecology 203, nᵒ 2 (août 2010): 120.e1-6, https://doi.org/10.1016/j.ajog.2010.05.023. 

[14] John Penders et al., « Factors Influencing the Composition of the Intestinal Microbiota in Early Infancy », Pediatrics 118, nᵒ 2 (août 2006): 511‑21, https://doi.org/10.1542/peds.2005-2824.

[15] Yan Shao et al., « Stunted Microbiota and Opportunistic Pathogen Colonization in Caesarean-Section Birth », Nature 574, nᵒ 7776 (octobre 2019): 117‑21, https://doi.org/10.1038/s41586-019-1560-1.

[16] M. B. Azad et al., « Impact of Maternal Intrapartum Antibiotics, Method of Birth and Breastfeeding on Gut Microbiota during the First Year of Life: A Prospective Cohort Study », BJOG: An International Journal of Obstetrics and Gynaecology 123, no 6 (mai 2016): 983‑93, https://doi.org/10.1111/1471-0528.13601.

[17] Ming Ho et al., « Oral Lactobacillus Rhamnosus GR-1 and Lactobacillus Reuteri RC-14 to Reduce Group B Streptococcus Colonization in Pregnant Women: A Randomized Controlled Trial », Taiwanese Journal of Obstetrics & Gynecology 55, nᵒ 4 (août 2016): 515‑18, https://doi.org/10.1016/j.tjog.2016.06.003.

[18] Irene Aloisio et al., Applied Microbiology and Biotechnology 98, nᵒ 13 (juillet 2014): 6051‑60, https://doi.org/10.1007/s00253-014-5712-9.

« Preventing Group B Strep Disease | CDC », https://www.cdc.gov/groupbstrep/about/prevention.html.
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FAQ

Est-ce que le streptocoque B est contagieux ?

Le streptocoque B est contagieux et va être transmis par contact, notamment au cours de l’accouchement si bébé se trouve en contact avec la bactérie. 

Comment attraper le streptocoque B chez l'homme ?

La transmission materno-foetale est essentiellement aérodigestive, par inhalation ou ingestion de liquide amniotique contaminé après rupture des membranes, ou au moment du passage à l’accouchement. 

Quels sont les symptômes du streptocoque ?

Souvent, les personnes qui en sont porteuses ne présentent aucun symptôme. Parfois on peut avoir des signes cliniques comme des sensations de brûlures au niveau du vagin.
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