Boire et manger pendant l’accouchement : est-ce possible ?
Il est bénéfique de boire pendant le travail
Vous pouvez manger un peu si votre grossesse n’est pas à risque
Le jeûne complet pourrait avoir des effets négatifs sur votre organisme
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Au Royaume Uni on observe 1 cas d’aspiration du contenu gastrique pour 120 000 femmes
- 01. Quelles sont les recommandations officielles sur manger et boire pendant l’accouchement ?
- 02. D’où vient le fait de jeûner pendant le travail ?
- 03. En pratique, est-ce possible de manger et boire pendant l’accouchement ?
- 04. Y a-t-il un impact du fait de ne pas manger pendant le travail ?
- 05. Boire ou manger pendant l’accouchement, est-ce pareil ?
- 06. En conclusion
Quelles sont les recommandations officielles sur manger et boire pendant l’accouchement ?
La société française d’anesthésie et de réanimation autorise les liquides non particulaires
En 2006, la Société française d’anesthésie et de réanimation remet elle aussi en question le jeûne pendant le travail en affirmant dans ses recommandations pour la pratique clinique que “la femme en travail bénéficiant d’une analgésie péri médullaire peut être autorisée à absorber des liquides non particulaires (accord de grade B) sauf en cas de diabète, d’obésité morbide ou de césarienne” [1].
Exemples de liquides clairs non particulaires : eau, jus de fruit sans pulpe, boissons gazéifiées, thé clair, café noir, boissons pour sportifs, etc.
L’American society of anesthesiologists dit que les liquides clairs peuvent être autorisés
La haute autorité de santé (HAS) autorise la consommation de liquides clairs
Manger n’est pas recommandé pendant le travail par la HAS
Cependant, pour ce qui est de manger, ils indiquent que : “La consommation d'aliments solides ne semble pas apporter de bénéfice maternel ou foetal, et contribue à augmenter le contenu gastrique. Il est recommandé de ne pas consommer d'aliments solides pendant la phase active. Les données actuelles sont insuffisantes pour émettre une recommandation pendant la phase de latence.”
Les recommandations européennes de 2011 sont les suivantes.
- Les femmes en travail peuvent boire des liquides clairs (eau, jus de fruit sans pulpe, thé ou café sans lait) à volonté (niveau de preuve 1++, recommandation grade A) (limitée à de petits volumes en cas de grossesse à haut risque)
- Les apports alimentaires solides sont à décourager pendant le travail (niveau de preuve 1+, recommandation de grade A), notamment en cas de grossesse à haut risque. Néanmoins, les patientes à bas risque pourraient être autorisées à consommer de petites quantités d’aliments solides tels que des biscuits ou biscottes pendant le travail.
D’où vient le fait de jeûner pendant le travail ?
Le syndrome de Mendelson
Le risque derrière la pratique du jeûne est la pneumopathie d’inhalation (inhalation bronchique), autrement appelé le syndrome de Mendelson. C’est un événement rare qui peut arriver en cas d’anesthésie générale lors d’une césarienne. Il correspond au risque d'inhalation bronchique du contenu gastrique, notamment pendant l'anesthésie générale, qui peut entraîner une inflammation pulmonaire ou un décès [5].
Quand on se fait opérer sous anesthésie générale, on demande de jeûner avant pour cette raison.
La plupart des césariennes sont désormais réalisées sous anesthésie péridurale ou locorégionale, le risque étant alors nettement inférieur parce que la femme est réveillée et que le réflexe de toux reste intact. Une sonde respiratoire, qui empêche le passage des aliments, est normalement placée dans la trachée lors de l'anesthésie générale pour essayer d'éviter ce problème. Toutefois, l'inhalation peut quand même se produire avant l'insertion de la sonde et au moment de son retrait [6].
Le pourcentage d’utilisation de l’anesthésie générale a ainsi décliné. Une étude sur 257 000 accouchements a montré que l’anesthésie générale pour une césarienne avait été réalisée pour 5.6% des femmes [7].
Quels sont les risques réels de nos jours ?
Dans une large étude sur 45 millions de naissances aux Etats Unis entre les années 1979 et 1990, les chercheurs ont analysé 129 décès maternels causés par des effets reliés à l'anesthésie. Parmi elles, 67 femmes sont décédées de complications de l'anesthésie générale, et pour 33 d’entre elles cela était dû à des problèmes d’aspiration [8].
Le risque apparaît donc comme très faible.
Au Royaume Uni, les femmes sont encouragées à boire et à manger si elles le souhaitent durant le travail. Le projet d’audit national a pu mettre en évidence 23 cas d’aspiration du contenu gastrique sur 2 872 600, soit environ 1 cas pour 120 000 femmes [9].
En pratique, est-ce possible de manger et boire pendant l’accouchement ?
OUI, si l’accouchement est sans risque et qu’il est très peu probable d’avoir besoin d’une anesthésie générale pendant le travail, il est a priori possible de manger et de boire pendant le travail.
Manger pendant le travail n’aurait pas d’effet sur la stagnation de la dilatation
Manger pendant le travail serait même bénéfique sur la longueur du travail
Manger pendant le travail n’entrainerait pas de complication à l’accouchement sur les grossesses à bas risque
Y a-t-il un impact du fait de ne pas manger pendant le travail ?
Le jeûne pendant l'accouchement semble avoir des effets métaboliques négatifs, entraînant un stress inutile et la production de cétones [13].
Le jeûne complet peut être stressant pour l'organisme: augmentation des hormones comme le cortisol (hormone du stress) et l’adrénaline.
Accoucher demandant autant d'énergie que courir un marathon ! La demande en oxygène augmente de 40 % pendant la phase de dilatation et de 75 % durant les efforts expulsifs.
Le métabolisme des femmes forcées de jeûner risque de puiser de l'énergie dans les graisses si le travail se prolonge (phénomène de cétose), augmentant l'acidité du sang de la mère comme de l'enfant (augmentation des lactates). Les lactates peuvent être transférés au fœtus ce qui l’expose à une acidose [14].
Le fait de ne pas boire ralentit la vidange gastrique et augmente l’acidité !
DANS QUEL CAS FAUT-IL VRAIMENT JEÛNER ?
Si j’ai un facteur de risque qui peut augmenter le risque d’inhalation du contenu gastrique (Par exemple : éclampsie, la pré-éclampsie, obésité, et l’utilisation d'opioïdes par voie intraveineuses comme la morphine pour soulager la douleur) ou si j’ai un risque accru de césarienne pendant le travail [15].
Boire ou manger pendant l’accouchement, est-ce pareil ?
Manger augmente le contenu gastrique ce qui pourrait augmenter le risque de vomissement, mais boire n’a pas d’effet
Les boissons isotoniques pourraient être une bonne alternative qui n’augmente pas les vomissements
Les boissons isotoniques, dont il a été démontré qu'elles sont rapidement vidées de l'estomac et absorbées par le tractus gastro-intestinal, peuvent constituer une stratégie nutritionnelle alternative pendant le travail. L’étude précédente a montré que la consommation de 925 mL de boisson isotonique pendant le travail, en comparaison avec 478 mL d’eau, n’avait pas d’impact sur l’incidence et le volume des vomissements pendant le travail et une heure après. Dans ce travail, le sur-risque potentiel de syndrome d’inhalation n’a pas été retrouvé.
S’hydrater est toujours bénéfique : l’ingestion de liquides clairs accélère la vidange gastrique et diminue l’acidité gastrique, améliore le confort, limite le stress généré par la privation de boire [17] et n'augmente pas le risque de vomissement.
En conclusion
La pratique du jeûne pendant l’accouchement est désuète et ne devrait plus avoir lieu de nos jours. Les études montrent que manger est sans danger, bien que certaines observent une augmentation du risque de vomissement, sans toutefois augmenter le risque d’inhalation bronchique.
Quant au fait de boire, cela apparaît non seulement comme sans danger mais également comme bénéfique !